dimanche, janvier 30, 2011

ESSAIE NUCLEAIRE DE LA FRANCE AU SAHARA ALGERIEN

Les premiers essais en Algérie (1960-1966) ont cinquante ans


Le premier essai nucléaire français, Gerboise bleue, est effectué le 13 février 1960, sous présidence de Charles De Gaulle. Toutefois, c'est au début d'avril 1958 que Félix Gaillard, premier ministre sous la présidence de René Coty, décide que ce premier essai aura lieu au début de l'année 1960 et que le site de test sera localisé au Sahara 1.

Un champ de tir a été créé à Reggane, au centre du Sahara algérien et à 600 kilomètres au sud de Béchar. Les tirs ont été effectués à partir d'une tour située plus précisément à Hamoudia, à une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest de Reggane.

Le rapport annuel du CEA de 1960 montre l'existence d'une zone contaminée de 150 km de long environ.

À la suite immédiate du putsch des Généraux (23 avril 1961) (ou " putsch d'Alger "), le gouvernement français a ordonné la détonation du 25 avril 1961 (Gerboise verte) afin que l'engin nucléaire ne puisse tomber dans les mains des généraux du putch.

Les essais en galerie au Hoggar
La France doit abandonner les essais aériens à la faveur d'essais souterrains, moins polluants. Le site choisi In Ecker (Sahara algérien) se trouve au sud de Reggane et à environ 150 km au nord de Tamanrasset. Les tirs sont réalisés en galerie, celles-ci étant creusées horizontalement dans un massif granitique du Hoggar, le Tan Afella. Ces galeries se terminaient en colimaçon pour casser le souffle des explosions et étaient refermées par une dalle de béton. Elles devaient permettre un bon confinement de la radioactivité.

Le 7 novembre 1961, la France réalise son premier essai nucléaire souterrain. Mais le 1er mai 1962, lors du deuxième essai souterrain, un nuage radioactif s'est échappé de la galerie de tir. C'est l'accident de Béryl (du nom de code de l'essai).

Gerboise bleue a 50 ans
Gerboise bleue est le nom de code de l'opération tenue secrète qui avait pour objectif l'essai de la première arme nucléaire de la France. Il s'agissait d'une bombe atomique, détonnée sur le site d'essai nucléaire de Reggane dans le Tanezrouft au centre du désert Sahara, alors territoire français rattaché à l'Algérie française, le 13 février 1960 à 7 h 04 au point 23°19'N 0°4'W 4. La bombe avait une puissance de 70 kilotonnes (l'équivalent de 4 fois Hiroshima) et était perchée sur une tour à 100 mètres de hauteur.

Un de ses créateurs est le général Pierre Marie Gallois.

La gerboise est un petit rongeur des steppes ; le bleu est la couleur symbolisant généralement la France à l'international.

Le plus puissant premier test de bombe A
Avec Gerboise Bleue, la France est devenue la quatrième puissance nucléaire, après les États-Unis, l'URSS et le Royaume-Uni. Ce test a été de loin le plus grand premier essai de bombe à cette date, plus grand que l'américain " Trinity " (19 kt), le soviétique " RDS-1 " (22 kt), ou le britannique " Hurricane " (25 kt). Son rendement était de 70 kt, plus que ces trois bombes réunies. La deuxième plus puissante première bombe-test a été " Chagai-I ", déclenchée par le Pakistan en 1998, avec 40 kt.

En comparaison, Fat Man, la bombe de Nagasaki, était de 22 kilo-tonnes, trois fois moins puissante.

Seules deux autres bombes A testées dans le Sahara furent plus puissantes : " Rubis " (< 100 kt, 20 octobre 1963), et " Saphir " (< 150 kt, 25 février 1965). Toutes deux ont explosé dans des installations souterraines au Hoggar.
L'armée française avait prévu une explosion entre 60 et 70 kt. Gerboise Bleue a donc été un succès total.

Les réactions internationales
À cause des critiques croissantes, la France a cessé ses essais atmosphériques dans le désert et mené des essais souterrains quelques mois après l'indépendance de l'Algérie en 1962 selon les accords secrets d'Évian avec le FLN. Ces accords prévoyaient que la France utiliserait pour une durée de cinq ans les sites comprenant les installations In-Eker, Reggane et de l'ensemble de Colomb-Béchar-Hamaguir pour des essais d'armes chimiques. Les discussions franco-algériennes de 1962 sont assorties d'accords secrets, jusqu'en 1978, les militaires français pourront ainsi continuer à faire des essais d'armes chimiques et bactériologiques à Colomb-Béchar-Hamaguir, dans la région nord du Sahara. Cette région, un polygone d'essai de 100 kilomètres de long sur 60 de large, a été le plus vaste centre d'expérimentation d'armes chimiques au monde, Russie exceptée.

De février 1960 à avril 1961, la France a testé quatre bombes dans l'atmosphère Reggane, les quatre bombes Gerboise. Trois d'entre elles étaient un test des engins de secours ("dispositifs d'urgence"), avec des rendements volontairement réduits à moins de 5 kilotonnes.

Avec les essais souterrains, la séquence a été modifiée pour la désignation des noms bijou, à partir de novembre 1961 avec " Agathe " (< 20 kt). Le 1er mai 1962, au cours du deuxième essai, 1'" accident de Béryl " contamine plusieurs personnes. L'épisode fut déclassifié de nombreuses années plus tard.

Cinq mois après la dernière bombe Gerboise, l'Union soviétique a répondu en rompant le moratoire des essais dans l'atmosphère, réglé de facto depuis la fin de 1958 avec les États-Unis et le Royaume-Uni. L'URSS a mené de nombreux tests d'amélioration, à partir de septembre 1961 avec une série d'essais de 136 bombes H. La série comprenait la bombe la plus puissante jamais testée, de 50 mégatonnes (50 000 kt) " Tsar Bomba ". Bien que l'Union soviétique maîtrisât la technologie de la bombe H depuis 1955, ce " dossier " pourrait avoir été conçu, dans le contexte de la guerre froide, comme une réponse à la France qui apparaît comme une troisième puissance nucléaire occidentale.

Pour réponse, les États-Unis ont réactivé leur propre programme d'essais atmosphériques avec une série de 40 explosions d'avril 1962 à novembre 1962.

La Chine a également lancé son propre programme nucléaire, résultant de la bombe A " 596 " (22 kt) qui a été testée le 16 octobre 1964, et la bombe H-Test no 6 (3,3 Mt), testée le 17 juin 1967.

En 1968, la France fait exploser sa première arme thermonucléaire, Canopus (2,6 Mt), à la nouvelle installation à Fangataufa, un atoll désert, en Polynésie française.

Il a fallu attendre 2006 pour que plusieurs sites, non décontaminés par l'armée française, ni par l'Algérie soient interdits au public.

C'est en 2009, après une information judiciaire (et donc enquête) ouverte à Paris en septembre 2004 contre X, à propos des conséquences des essais nucléaires français, menés au début des années 1960 au Sahara, et jusqu'en 1996 en Polynésie française, sur les civils et militaires qui y ont assisté sans être suffisamment protégés.
Dans le Sahara, la France avait procédé à un total de 17 essais nucléaires (13 souterrains à In Eker, dans le Hoggar, à quelques centaines de kilomètres au sud de Reggane et 4 atmosphériques Gerboise Bleue réalisée au sud de Reggane, dans le Sahara Algérien, le 13 février 1960.
Gerboise Blanche le 1er avril 1960.
Gerboise Rouge le 27 décembre 1960 et Gerboise Verte le 25 avril 1961) et après qu'un tribunal français ait accordé (le 7 juin 2008) une pension d'invalidité à vie à un ancien militaire âgé de 65 ans et victime d'une polymyosite pouvant avoir pour origine sa participation à des essais nucléaires en Algérie, que la France a annoncé un projet de loi d'indemnisation des victimes de ses 210 essais nucléaires, appuyé sur un fonds prévu de 10 millions d'euros.
En Algérie, les médecins et ONG locales estiment que le nombre d'anomalies et problèmes de santé est encore anormalement élevé dans cette zone. On admet aujourd'hui que différentes pathologies, dont cancers (cancer de la thyroïde, cancer du poumon, cancer du sein, leucémie, certaines anomalies congénitales, etc.) peuvent avoir été induites par l'irradiation ainsi subie.

De novembre 1961 à février 1966, treize tirs en galerie ont été effectués dont quatre n'ont pas été totalement contenus ou confinés (Béryl, Améthyste, Rubis, Jade). Malgré cela, ce système donnait satisfaction mais les Accords d'Évian ayant prévu que la France devait abandonner ses expériences au Sahara, l'État français a dû se mettre à la recherche d'un autre site.







Le document secret de l'armée française

Cinquante ans après l'explosion de la première bombe atomique française dans le Sahara algérien, alors sous domination coloniale française, des milliers de vétérans, convaincus d'être contaminés par la radioactivité, veulent la reconnaissance de leur préjudice.

Le 13 février 1960 vers 7 h, près de Reggane, à 1700 km d'Alger, la France procède à son premier essai nucléaire avec une bombe au plutonium, lors de l'opération Gerboise bleue.

Juste après la déflagration, des dizaines de techniciens en combinaison antiradiation n'avaient que 15 à 20 minutes, avant les retombées radioactives, pour récupérer sur les lieux de l'explosion les précieux appareils de mesure enfouis dans le sable.

Au total, 6000 à 7000 personnes travaillaient depuis des mois pour cet essai au Centre saharien d'expérimentation militaire de Reggane.

L'Association des vétérans des essais nucléaires (AVEN) se bat depuis plusieurs années avec une multitude de documents obtenus auprès des 4500 adhérents qu'elle représente.

Selon une étude de l'association, les vétérans ont deux fois plus de cancers que les Français de plus de 65 ans. Elle note également une mortalité infantile trois fois supérieure à la moyenne chez leurs descendants.

Le rapport " confidentiel défense " que " le Parisien - Aujourd'hui en France " s'est procuré ( paru sous le titre : Quand les appelés du contingent servaient de cobayes) est un résumé d'envergure sur les essais nucléaires au Sahara entre 1960 et 1966. Jusqu'à aujourd'hui, très peu d'éléments avaient filtré sur les expérimentations réalisées par l'armée française sur ses troupes dans le cadre de l'élaboration de la bombe atomique.

Seul " le Nouvel Observateur " avait publié en 1998 un article sur Gerboise verte, le nom de code du dernier tir atmosphérique du 25 avril 1961, issu des archives de la Grande Muette. Aussitôt après, celle-ci les avait refermées.

Le document que nous révélons porte notamment sur les manoeuvres en " ambiance nucléaire ", effectuées ce 25 avril 1961. En voici les principaux extraits.

Etudier les effets de la bombe sur les hommes.
Selon le rapport, il s'agit d' "expérimentations tactiques". Leurs noms de code sont Garigliano pour les fantassins, Bir Hakeim pour les chars. Il s'agit d'" exécuter (...) deux manoeuvres dans un cadre offensif et une dans un cadre défensif " afin d'étudier " la réoccupation d'une position touchée par une explosion nucléaire ". 300 personnes y prennent part, essentiellement des appelés issus de régiments situés en Allemagne, 42e RI et 12e régiment de cuirassiers. L'objectif de ces essais est très clair : " Etudier les effets physiologiques et psychologiques produits sur l'homme par l'arme atomique. "

La troupe à 275 m de l'explosion atomique.
Le rapport relate très précisément la journée du 25 avril 1961, quelques minutes après l'essai atomique. A " H + 20 min, les hommes sortirent des abris, regardèrent le nuage avec appréhension (...). A H + 35 min, la section progressa à pied. Les véhicules vides suivaient à 100 m (...). Deux kilomèt- res furent couverts en 40 min (...). A 1 100 m du " point zéro " (NDLR : l'en- droit où la bombe vient d'exploser), les hommes apercevaient nettement les dégâts occasionnés (...). A environ 700 m, (...) la progression fut stoppée." " Le détachement d'engins blindés de reconnaissance traversa la zone de retombées à H + 1 heure. Une patrouille de véhicules tout-terrain était chargée de faire un raid sur le point zéro pour étudier les possibilités d'attaque en zone contaminée (...). Cette patrouille fut arrêtée à 275m du point zéro. "

Un masque antipoussière plutôt qu'un masque à gaz.
Les enseignements tirés de cette manoeuvre sont édifiants. Le rapport indique par exemple que les hommes semblaient "capables de poursuivre le combat, dans la mesure où le moral n'aurait pas été trop fortement atteint". En conséquence, en cas de guerre, il est indispensable d'obtenir un " oup au but" sur l'ennemi.

Autre " problème " mis en évidence : le masque à gaz complique les communications. Il sera décidé que lors d'un conflit, " le commandant ne devra pas pénétrer en zone contaminée ". En revanche, pour les hommes à pied, comme " le rythme de la manoeuvre serait diminué de 50 % tant que le port du masque resterait obligatoire ", son " remplacement par un masque antipoussière élémentaire a été demandé ".

L'amateurisme des autorités.
Les auteurs du rapport montrent comment les concepteurs des armes atomiques françaises font manipuler à la troupe des substances dont ils connaissent pourtant les dangers.

Pour les essais souterrains, il est décidé que lors d'" un travail en atmosphère contaminée, l'autorité responsable peut autoriser les travailleurs à ne pas porter le masque (...) et leur faire inhaler en un jour, à titre exceptionnel, ce qui est normalement autorisé en trois mois ". Les militaires se réservent le droit d'autoriser un court séjour sans précaution spéciale, même en zone interdite". Quant à la puissance des bombes, elle reste totalement aléatoire. Pour Gerboise verte, " son énergie n'est pas connue avant le tir ".

Les essais souterrains n'échappent pas à la règle. Alors que " seuls " quatre accidents étaient connus, le rapport montre qu'il n'y a qu'un tir sur les treize réalisés qui fut contenu, les autres donnant lieu à des fuites radioactives.

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